Maintenant que nous possédons une clé
réseau 3G Wifi, il est beaucoup plus facile de se connecter, et les articles
seront moins long à venir, elle est pas belle la vie?
Cela fait un mois que nous sommes partis et il ne s'est passé que six jours depuis
notre départ de Pondy, et pourtant, il nous semble que cela fait déjà une
éternité... Sûrement à cause des trajets de 4 à 7 heures en bus qui pimentent
nos journées, et la fatigue qui en découle. Il faut dire que les trajets en
Inde ne sont pas de tout repos, surtout quand le chauffeur du car garde la main
fermement enfoncée sur le klaxon quatre heures durant... Car ici, pour ceux qui
ne s'en doutaient pas, c'est la loi du plus fort, enfin, du plus gros plutôt,
qui régit les routes. Les poids lourds n'hésitent donc pas à faire valoir leurs
droits en se doublant allègrement les uns les autres (en klaxonnant bien
entendu), et à pousser les véhicules arrivant de front sur le bas-côté. Tout un
poème... De la même manière, nous nous sommes rendus compte en conduisant des
deux roues, que les indiens ne savent pas tourner la tête lorsqu'ils
conduisent. Ni pour tourner, ni pour s'engager sur une voie principale. Encore
une fois, ils préfèrent klaxonner à tout rompre et laisser aux autres le soin
de s'écarter. C'est très particulier. Je me demande comment ils ne déplorent
pas plus d'accidents que cela. Samia, quant à elle, estime que les mecs se
délivrent ainsi de toute leur hargne et leur frustration sexuelle. C'est une
théorie comme une autre, hein!
Mais revenons à nos vaches
sacrées: Nous nous sommes arrêtés à Tanjore pour deux raisons. Premièrement,
pour éviter un trajet trop long, et ensuite afin d'aller visiter le fameux
Temple Brihadishvara, communément appelé "Big Temple", et
construit au Xème siècle par l'empereur Rajaraja, de la Dynastie Chola. C'était
splendide. D'autant plus que le temple est toujours en activité et que de
nombreux fidèles viennent prier dans cet édifice dédié à Shiva. Le plus
curieux, dans cette visite, fut tout de même de voir une trentaine de personnes
compter d'énormes liasses de billets, offrandes des fidèles, au vu et au sus de
tous, tandis que des mendiants s'activent pour survivre à deux pas de là.
Mais c’est en sortant du
temple que nous sommes tombés sur le plus improbable. Un cirque itinérant
indien. Bon calmez tout de suite vos ardeurs, c’était loin d’être aussi
alléchant que ça en a l’air. En fait, hormis quelques numéros passablement
spectaculaires, bien que totalement éculés, l’ensemble relevait plus d’une
troupe amatrice de lycéens complètement désintéressés par ce qu’ils faisaient.
Ainsi, entre une jeune coréenne faisant du Hoola-Hoop (bon, ok, il y’en avait
cinq en même temps), trois jeunes thaïlandais qui avalaient des (petits) sabres
ou s’allongeaient sur des lances émoussées, et un tibétain qui faisait
tournoyer (super bien il faut l’admettre) son bâton du diable, une quinzaine
d’adolescentes chinoises et potelées exécutaient sans grande conviction des
chorégraphies moins dignes que la Macarena. Vous me direz, c’était donc un
cirque asiatique ! Eh bien non, même pas… Il y’avait bien un couple indien
qui tirait à la carabine à plomb sur des ballons dans des positions saugrenues,
un motard qui faisait du cross dans une boule en fer, un vieux dresseur de
poneys et de dromadaires, un éléphant qui jouait au cricket avec des ballons de
foot, quelques numéros de corde et de trapèze intéressants, et même deux
clowns, dont un nain aux jambes arquées… Seulement, le chapiteau n’étant rempli
qu’au dixième de sa capacité d’accueil, et le public indien n’étant décidément
pas le plus enthousiaste du monde, le résultat fut un peu… morne. Et nos éclats
de rire étaient le plus souvent suscités par le fait que les artistes devaient
s’y reprendre à plusieurs reprises pour réussir leurs tours. Enfin…
De Tanjore, nous sommes
repartis pour Maduraï, grosse ville exécrable par excellence, avec sa
circulation, son bruit en continu, sa saleté omniprésente et ses chauffeurs de
Rickshaws qui essaient systématiquement de vous entuber. Néanmoins, nous avons
eu l’immense plaisir de nous rendre au
Temple Sri Meenakshi, où nous en avons pris plein les mirettes. En effet,
l’édifice serait l’un des plus grands du pays, tant en superficie que de par
ses onze Gopurams (tours pyramidales
recouvertes de statues), peintes de couleurs vives, dont quatre mesurent plus
de 60 mètres. Aucun adjectif ne saurait dépeindre avec exactitude la beauté de
l’endroit, la magnificence des salles de prières intérieures, les colonnes et
piliers sculptés, les autels, les peintures… Environ 10 000 fidèles viennent
chaque jour dans cet immense sanctuaire. Je vous laisse imaginer le bordel. Et
l’atmosphère, chargée d’encens et de ferveur religieuse, est tout bonnement
incroyable. Des foules entières s’assoient par terre et psalmodient leurs
prières, des hommes s’allongent soudainement sur le sol et brassent l’air de
leurs bras, des femmes confient leurs souhaits et leurs secrets aux oreilles de
pierre de leur divinité, des processions impressionnantes suivent des cortèges
de prêtres à moitié nus, portant des palanquins sacrés sur leurs épaules, les
gens se badigeonnent le front de cendres… C’est stupéfiant. Samia était prête à
se convertir, c’est pour dire !
Malheureusement, certains
endroits, au sein du temple, sont fermés aux non-hindous, et nous n’avons pas
pu accéder au saint des saints, c’est-à-dire aux chambres de Shiva (sous une
coupole d’or) et de son épouse Parvati. Apparemment, tous les soirs à 21h, on
déplace la statue de Shiva dans le sanctuaire de sa bien-aimée, afin qu’ils
passent la nuit ensemble. Ces épousailles quotidiennes viseraient à revitaliser
chaque jour l’énergie de l’univers tout entier ! J’aurais été curieux de
voir comment les deux statues s’en sortent une fois les lumières éteintes…
Autre lieu splendide, le Mandapa aux
mille colonnes, une superbe galerie ne contenant en fait « que » 985
piliers superbement ouvragés, représentant un panel assez conséquent des
divinités indiennes. Enfin, conséquent, quand on sait qu’ils comptent plus de
33 millions de dieux…
Et nous voici maintenant à
Kodaïkanal, où Samia vient de remporter le championnat du monde toutes
catégories de vomi spontané en mode geyser ininterrompu. Les chappattis aux
oignons d’hier ne sont pas bien passés. Ajoutez à cela le trajet en bus, sur
une route de montagne en lacets, interminable et cahoteuse, mélangez le tout et
vous obtiendrez une fontaine explosive ! Il est vrai que l’ascension fut
un peu longue et tumultueuse, mais les paysages étaient fantastiques : Des
lacs cachés au fond de petites vallées ombragées, des gorges étroites d’où
ruissellent de multiples cours d’eau et cascades, des forêts d’immenses
eucalyptus s’élançant vers le ciel, des cultures en terrasses… Par contre, l’arrivée nous a un peu
décontenancés. Kodaïkanal est une station climatique de montagne très prisée des indiens,
car il y fait frais, voire frisquet, et le temps est assez humide, ce qui doit
les changer agréablement des chaleurs de la plaine. Les prix s’en font sentir,
même si la qualité n’est pas toujours au rendez-vous, et les hôtels étant pris
d’assaut, nous nous sommes retrouvés le premier soir dans un boui boui un peu excentré, rempli
d’hommes venus ici se bourrer la gueule. Charmant. En fait, nous n’avons
quasiment pas dormi de la nuit, vu le boucan qu’ils faisaient, et j’ai vraiment
pété un câble lorsqu’à 5h30, six mecs se sont mis à hurler, la télé à fond, se
foutant éperdument du reste de l’hôtel. J’ai réussi à en calmer certains, mais
les autres n’en ont crié que de plus belle. Quatre heures plus tard, nous
changions de guest house, et logeons désormais dans un centre méthodiste, au
calme, avec des gens aimables.
Comme dit plus haut, on se les gèle un peu, surtout le soir (Samia s'est chopé la crève la pauvre), et il est assez amusant de voir des indiens en pull, coiffés de bonnets ou de caches-oreilles. Dans l'ensemble en fait, on se marre pas mal à observer le comportement des vacanciers locaux, assez fortunés pour la plupart. Entre les ballades en pédalo sur le lac Kodaï, à cheval ou en tandem tout autour, les séances photos en famille dans les endroits les plus kitchs, ou encore ceux qui mangent des glaces par 10°, oui, on se bidonne. Quant au panorama, il est tout simplement sublime. Noyée dans les nuages, la ville se nappe de brumes au petit matin et en soirée, mais offre une vue imprenable sur les vallées et collines alentours dès que le soleil se lève. Un régal pour les yeux.
Demain, nous quitterons ce petit paradis montagnard pour nous rendre au Kérala via Kumily et Allepey, avant de rejoindre Kochi où nous prendrons l'avion pour Bombay, puis le Rajasthan, en train. Tout un programme!