Troisième ville de Thaïlande (quoique 50
fois moins peuplée que Bangkok), entourée de montagnes verdoyantes, Chiang Mai
sert essentiellement de camp de base pour l’organisation d’excursions dans la
région. Disons le tout de suite, cette bonne grosse ville de province nous a
énormément plu, tant par les activités sportives qu’elle propose que par son
patrimoine culturel. Et vu que cela fait maintenant dix jours que nous
squattons sans états d’âme la superbe C&C Teak House (belle maison datant
de 1887 et tenue par le jovial français Simon et sa gentille épouse Rung), il
serait malvenu de notre part de dire le contraire.
Allez ! Un brin d’histoire pour
commencer, car je sais que vous adorez ça… Chiang Mai fut fondée par le roi
Mengrai à la fin du XIIIème siècle, et c’est à cette époque que les canaux et
les remparts formant le carré central de la ville furent creusés et élevés. La
petite ville devint la capitale du royaume du Lan Na après l’alliance des
royaumes de Sukhothai et de Chiang Rai (plus au nord), et pour éviter toute
agression, le roi passa plusieurs accords de protection avec les souverains
environnants. Malgré cela, la cité finit par tomber sous la coupe d’Ayutthaya,
puis entre les mains des Birmans à la fin du XVIème siècle. Coupé du reste du
pays jusqu’au début du XXème siècle, car aucune route n’y menait (!), le royaume
développa un courant artistique particulier, le style Lanna, inspiré par l’art
birman et lao.
Mais revenons à nos moutons, Chiang Mai
nous aura surtout permis de nous éclater comme des petits fous, et de bien nous
lâcher niveau budget d’ailleurs. Nous aurons également revu Marjolaine la
hollandaise, rencontrée à Bangkok, qui a réussi à convaincre Samia de chanter « What’s
up », de Four None Blondes, avec un groupe de reprise dans un bar rock… Après
cela, nous avons passé une journée entière dans la piscine d’un hôtel de luxe,
pour profiter d’un repos bien mérité (sic), et ceci sans que l’on nous demande
d’en payer l’accès (re-sic). Puis les jours se sont succédé à un rythme assez
effréné, nous voyant sillonner la région sur notre brêle de location, explorant
les environs proches et multipliant les sorties touristiques. Il faut dire que
les thaïlandais sont très forts, et savent proposer aux visiteurs tous types d’activités,
plus alléchantes les unes que les autres, poussant toujours plus à la
consommation. Je sais, c’est triste, mais nous sommes vraiment tombés dans le
panneau.
Après avoir visité quelques-uns des
nombreux temples de la ville, nous sommes allé voir le monastère de Mae
Sampaeng, lieu de recueillement et de méditation, car Samia désirait faire
retraite, mais à sa demande d’y demeurer deux ou trois jours seulement, le
moine lui a répondu dans un grand sourire que « la méditation ne se goûte
pas, mais se mange ». Dépités, nous nous sommes rendus au Wat Doi Suthep,
un temple perché sur la montagne dominant Chiang Mai (1676 m), mais bien que la
route fut belle et les virages jouissifs, la découverte de ce haut lieu
bouddhiste ultra-touristique m’a laissé un goût d’amertume en bouche. En effet,
ma vision du culte en a pris un sacré coup en constatant que les moines en
étaient réduits à jouer aux petits commerçants de boutiques de souvenirs, et qu’une
fois encore, seuls les farangs
devaient s’acquitter d’un droit d’entrée. Mais bon, le dôme doré était
splendide, et la route de retour fut encore plus plaisante que l’aller,
agrémenté qui plus est par une balade improvisée dans une mignonne petite
cascade.
Nous avons ensuite taillé la route à l’est
de la cité, dans une campagne peuplée de rizières et de forêts, pour nous
rendre aux sources d’eau chaude de Mae On. Encastré dans une petite vallée au
sublime panorama, le site dispose de deux geysers sulfureux, alimentant divers
bassins où l’on peut faire cuire des œufs (!), ainsi qu’un petit canal
serpentant à l’ombre des arbres, où l’on se trempe les pieds jusqu’à ce qu’ils
soient à point. Le parc propose également moult massages, ainsi qu’une piscine
d’eau minérale (chaude) dans laquelle nous nous sommes prélassés, encore une
fois sans payer de suppléments, hé hé hé… Quoi ? Il n’y a pas de petites
économies, et le mal n’était pas bien grand !
Un autre jour, nous rendant cette fois au
nord, à Mae Rim, nous n’avons pas chômé, commençant en beauté par le phénoménal
« Tiger Kingdom ». Certes cher, très prisé (et donc envahi de
touristes), ce parc offre la possibilité de caresser, faire des câlins, voire
même jouer avec des tigres de différents gabarits. C’est génial, comme dirait
Julien Catonné, claviériste émérite des Gars Dans l’Coin. D’aucuns diront que
les félins sont shootés pour ne pas être tentés de croquer les petits blancs
venus les emmerder, mais je préfère penser qu’ils étaient tout simplement
assommés par la chaleur et que nous avons couru un réel danger. Les guichetiers
prennent d’ailleurs soin de faire signer à l’entrée une décharge les
déresponsabilisant de toute attaque ou accident malencontreux pouvant survenir
lors de la visite. Nous avons donc débuté par de gros tigres, profitant de leur
sieste de midi pour les faire ronronner en les chatouillant un peu. C’est assez
impressionnant, et l’on n’est pas à l’abri de mouiller son froc lorsque l’un d’entre
eux vous fixe de son regard affamé. Puis nous sommes allés voir les petits, de
4 à 6 mois, déjà gros pour leur âge, et avons pu jouer avec l’un d’entre eux.
Ce pourraient être des gros chats, si ce n’est que leurs pattes sont vraiment
larges, épaisses, et disposent de griffes rétractiles bel et bien dangereuses.
Quant aux bébés, de moins de quatre mois (« plus chers »), nous les
avons observé de l’extérieur, pendant qu’ils grimpaient sur des japonaises ou
tentaient d’échapper aux dresseurs. C’était crô mignon, comme dirait ma petite
cousine.
Après cela, je n’en suis pas fier, mais
je me suis fait un petit kif en allant dans un centre de tir. Disons que les
prix étant bien plus bas que ceux proposés en France, c’était le bon moment
pour s’essayer au fusil à pompe et au Smith et Wesson calibre 38. Je ne m’attendais
vraiment pas à un recul de cette puissance, mais je pense m’en être bien sorti,
touchant tous les mannequins avec le fusil, et atteignant le cœur de la cible
avec le flingue. Quant à Samia, elle a bien essayé de tuer tout le monde dans
le stand, mais il s’est avéré qu’elle n’avait plus de balles, et a donc pu
poser sagement pour les photos. Je ne sais pas pour vous, mais moi elle me file
les miquettes en natural born killeuse… Pour clore cette merveilleuse journée,
nous avons escaladé les abords de la cascade de Mae Sa, étendue sur plus d’un
kilomètre, et avons pu jouir du décor enchanteur de la jungle luxuriante. Je m’y
suis baigné, mais les eaux pullulant de micro-sangsues, et craignant qu’elle me
pénètrent par… certains interstices, je vous avoue que je me suis carapaté vite
fait bien fait.
Enfin (oui, j’en vois certains qui
piquent du nez), nous avons participé à un « trek » d’une journée,
nous levant aux aurores et gagnant la vallée de Mae Teang en pick-up, en
compagnie de deux sympathiques anglaises, Kim et Joana, ainsi que d’un couple
de suisse-allemands, Maryse et Marcel. Je prends soin de minimiser le terme de « trek »,
utilisé dans la région à toutes les sauces, car bien que les excursions soient fournies
en activités et les programmes assez serrés, nous aurons marché en tout et pour
tout deux heures au maximum. Cela dit, c’était vraiment chouette. Nous avons
entamé la journée par une balade à dos d’éléphants, agrémentée par un accès de
colère soudain d’une maman, inquiète pour son rejeton facétieux qui traînait en
arrière, manquant de désarçonner nos jeunes anglaises qui la montaient ;
et également par la charge soudaine du même éléphanteau, désireux de me faire
participer à ses jeux, qui aurait pu me piétiner si les mahouts (cornacs) ne s’en étaient pas mêlé. C’est con, je voulais
jouer, moi !
Puis nous avons grimpé, à travers une
jungle vraiment dense, pour accéder à la fameuse cascade tant prisée par les
voyageurs du coin, utilisant des troncs d’arbres abattus comme des ponts,
escaladant des parois abruptes, et sautant de rochers en rochers comme des
cabris. Vous imaginerez aisément comme j’étais aux anges, et ce malgré une
chaleur digne d’un haut fourneau des enfers ! Pour clore dignement cette
journée marathon, nous avons descendu la rivière en rafting, pour le plus grand
plaisir de Samia, qui s’est découvert une nouvelle passion, même si, il faut l’avouer,
le parcours n’était pas si difficile, malgré une série de petits rapides
affriolants. S’est ensuivie une promenade en radeau de bambous, où j’ai préféré
me laisser porter au fil de l’eau, car le perchiste tentait de couler l’embarcation,
au grand dam des dames effrayées. J’avais de l’eau à mi-cuisse…
Nous repartons demain pour Chiang Saen et
le Triangle d’Or, munis d’une bonne petite guitare flambant neuve, acquise pour
moins de cinquante euros, le sourire aux lèvres et le cœur vaillant. Amis
français, bonne soirée !